Une nouvelle étape a été franchie dans le processus de paix entre la République démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda.
Dans la nuit du vendredi 7 au samedi 8 novembre, les deux pays ont paraphé à Washington le cadre d’intégration économique régional, constituant le volet économique de l’accord de paix signé le 27 juin dernier.
Cette signature intervient à l’issue de la quatrième réunion du comité conjoint de suivi de l’accord, sous la médiation du Qatar et des États-Unis, qui saluent une « avancée significative vers la normalisation complète des relations entre Kinshasa et Kigali ».
Une étape longtemps attendue
Ce texte, fruit de plusieurs mois de négociations, était prêt depuis la fin du mois d’août. Sa signature avait été reportée à plusieurs reprises en raison de divergences sur les priorités. Kinshasa avait insisté sur la nécessité de progresser d’abord sur les aspects sécuritaires avant toute intégration économique.
Mais vendredi, sous la supervision d’Allison Hooker, sous-secrétaire d’État américaine aux Affaires politiques, et de Massad Boulos, conseiller spécial du président américain pour l’Afrique, les délégations rwandaise et congolaise ont finalement apposé leurs signatures au bas du document.
Ce cadre économique définit les secteurs prioritaires de coopération entre la RDC et le Rwanda notamment les infrastructures transfrontalières, le commerce régional, l’énergie et la libre circulation des biens. Les États-Unis y figurent également comme partenaire d’appui stratégique.
Des progrès sur le papier, des défis sur le terrain
Toutefois, le texte précise que la mise en œuvre effective de ce cadre dépend de l’exécution satisfaisante des mécanismes sécuritaires prévus par l’accord de paix, à savoir le Concept of Operations (CONOPS) et l’Operational Order (OPORD). Ces dispositifs visent notamment à neutraliser les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR) et à lever les mesures défensives prises par Kigali.
Autrement dit, la coopération économique reste conditionnée à des avancées militaires concrètes.
« Il s’agit certes d’un progrès diplomatique, mais le véritable test se fera sur le terrain », confie à RFI un diplomate occidental impliqué dans le processus.
Kinshasa et Kigali ont, malgré tout, convenu de mesures immédiates : préparation conjointe d’opérations contre les FDLR, création d’un comité technique de mise en œuvre, et suivi régulier par les médiateurs qatari et américain.
Réactions officielles à Kinshasa et Kigali
Dans la soirée de ce samedi, les deux gouvernements ont publié séparément des communiqués officiels saluant la signature du texte et félicitant les médiateurs pour leurs efforts constants.
Pour Kinshasa, cet accord économique constitue un levier de stabilité et de développement régional, tandis que Kigali y voit un signal de confiance mutuelle retrouvée.
Le gouvernement congolais a rappelé que « la paix durable passe par la justice, la sécurité et la coopération équitable ». De son côté, Kigali a réaffirmé son engagement à « tourner la page du conflit et promouvoir une intégration bénéfique à tous les peuples de la région des Grands Lacs ».

Tshisekedi : “Nous sommes sur le point de cueillir le fruit de la paix”
En marge du sommet climatique de la COP30 à Belém (Brésil), le président congolais Félix-Antoine Tshisekedi s’est exprimé sur cette avancée, annonçant la conclusion imminente des processus de Doha et de Washington, deux cadres parallèles de négociations pour la paix dans l’Est du pays.
« Je suis heureux de vous annoncer que les pourparlers dont il est question à Washington et à Doha arrivent à leur terme. Dans les prochains jours, la Maison-Blanche va nous adresser officiellement une invitation à clôturer ce processus de l’accord de paix », a-t-il déclaré au micro de RFI.
« Mais attention, nous ne sommes pas naïfs. Ce n’est pas nous qui avons provoqué cette guerre. Beaucoup de pays voisins profitaient de notre pays et de notre économie. Nous nous sommes battus pour mettre fin à cela. Nous sommes à la fin. Nous sommes sur le point de cueillir le fruit de la paix, le fruit d’une paix durable en RDC », a-t-il ajouté en lingala.
Vers un tournant historique ?
Si les observateurs saluent la dynamique diplomatique en cours, tous reconnaissent que la situation sécuritaire dans le Nord-Kivu, le Rutshuru et le Masisi demeure précaire. Les combats sporadiques entre les FARDC, les groupes d’autodéfense Wazalendo et le M23 soutenu par Kigali continuent de fragiliser la confiance.
Les prochains mois s’annoncent donc décisifs. La communauté internationale, notamment le Qatar, les États-Unis et l’Union africaine, promettent de maintenir la pression diplomatique pour traduire les engagements signés en réalités tangibles sur le terrain.
Pour l’heure, Washington se félicite d’avoir permis cette avancée majeure, qualifiée d’« acte de foi en faveur d’une paix durable et d’une intégration économique fondée sur la confiance et le respect mutuel ».
Muller Mundeke Kalonji
