Le président de la République démocratique du Congo, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, a signé une ordonnance instituant des mesures conservatoires dans le secteur de la justice concernant les zones actuellement sous occupation de groupes armés dans l’Est du pays, notamment celles contrôlées par la coalition rebelle AFC/M23.
Des décisions judiciaires désormais nulles et non avenues
Selon le texte diffusé mardi 11 novembre sur la Radiotélévision nationale congolaise (RTNC), tous les actes et décisions à caractère juridique ou judiciaire pris par les forces d’occupation ou leurs représentants sont déclarés nuls et de nul effet.
« Sont nuls et de nul effet tous les actes et décisions revêtant un caractère juridique et/ou judiciaire pris par les forces d’occupation ou leurs représentants, tendant à soustraire la population des juges et magistrats que la Constitution et les lois lui assignent », stipule l’article 2 de l’ordonnance présidentielle.
Cette mesure vise directement l’AFC/M23, un mouvement rebelle soutenu par le Rwanda, qui administre plusieurs localités du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, où il a récemment tenté de mettre en place un système judiciaire parallèle.
Des informations font état de la création d’une commission chargée de recruter de nouveaux magistrats et de relancer des instances judiciaires locales, en violation de la législation congolaise.
Une réponse à une dérive institutionnelle dans les zones occupées
Cette décision présidentielle découle d’une recommandation formulée lors de la 56ᵉ réunion du Conseil des ministres, au cours de laquelle le gouvernement avait proposé d’interdire toute reconnaissance officielle des actes émanant des autorités de l’AFC/M23.
Kinshasa considère en effet ces initiatives comme une tentative de légitimer une autorité parallèle et de soustraire la population à l’ordre constitutionnel.
En prenant cette ordonnance, Félix Tshisekedi affirme vouloir protéger les citoyens congolais vivant dans les zones sous occupation contre des décisions arbitraires ou contraires à la loi. Le chef de l’État a également souligné que ces mesures sont temporaires et resteront en vigueur jusqu’au rétablissement complet de l’autorité de l’État dans les territoires concernés.
Un contexte sécuritaire et diplomatique tendu
Cette décision intervient dans un contexte sécuritaire extrêmement fragile dans l’Est de la RDC, où les affrontements entre les Forces armées de la RDC (FARDC) et les rebelles de l’AFC/M23 se poursuivent.
Depuis 2022, le mouvement rebelle a pris le contrôle de plusieurs localités stratégiques dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, provoquant le déplacement de centaines de milliers de civils.
Malgré les efforts diplomatiques de la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE), de la SADC et des Nations unies, les négociations de paix peinent à progresser. Kinshasa accuse régulièrement Kigali de soutenir militairement le M23, une accusation que le gouvernement rwandais continue de nier.
Une affirmation de la souveraineté judiciaire congolaise
Avec cette ordonnance, le président Tshisekedi envoie un signal fort : aucune autorité non reconnue par l’État ne peut exercer de fonctions judiciaires sur le territoire national.
Cette initiative s’inscrit dans la volonté du gouvernement de préserver l’unité et l’intégrité institutionnelle du pays face à la fragmentation imposée par les groupes armés.
Le gouvernement a, par ailleurs, réaffirmé sa détermination à restaurer la paix et l’autorité de l’État dans les provinces de l’Est, notamment à travers la poursuite des opérations militaires et la mise en œuvre d’un programme de stabilisation à long terme.
Muller Mundeke Kalonji
